La pédagogie de l’Art du Chi


30 MAR 2023


La pédagogie de l’Art du Chi


Aux professeurs et enseignants de l’Art du Chi
(Désolé, je ne dédouble plus. Je ne peux me résoudre à « Vous êtes tou.te.s les bienvenu.e.s ! » et je trouve humiliant de placer il ou elle entre parenthèses. Et puis il y a tous les autres dont il faudrait aussi tenir compte. Par convention et pour faciliter la lecture, je m’en tiens donc au masculin général qui, vous l’aurez compris, n’indique pas un genre, mais signale l’humain.) 
 
 
 
Il y a 42 ans, je rencontrais Vlady.
 
Pour les avoir pratiqués assidûment depuis bien des années, le Tai Ji Quan et les techniques de Chi qui y sont rattachées m’apparaissent de plus en plus entretenir des liens si étroits qu’elles semblent toutes faire partie d’une seule et même technique. Comme s’il n’y avait qu’une démarche, comme si elles n’indiquaient qu’un sens, une seule direction.
 
Comme si la Vie avait un sens. 
 
Il se trouve que ces liens entre les techniques sont la pédagogie de notre École, celle que Vlady nous a montrée. Cette pédagogie est donc très particulière, car elle n’a rien à voir avec les conventions qui ont cours dans notre société. Rien à voir avec la politesse, la gentillesse, elle ne consiste pas à connaître ou flatter la sensibilité et la psychologie de l’élève pour obtenir son adhésion, sa reconnaissance, quand ce n'est pas simplement son admiration et ses sous. Non, rien de tout ça, la pédagogie de l’École s’adresse à la véritable liberté de l’élève et de l’enseignant. Rien de moins !
 
Le professeur est peut-être doué pour l’enseignement, mais le plus important se trouve ailleurs. 
 
On ne peut reprocher à un professeur de ne pas avoir suffisamment de doigté avec ses élèves, on ne peut que lui reprocher des maladresses dans son Tai Ji Quan ou des flous dans ses techniques (et encore !). Il est vrai qu’on peut enseigner alors qu’on n’a pas encore saisi la véritable pédagogie de l’Art du Chi. C’est que cela prend du temps pour avoir un peu de recul sur le temps de Vie et voir autre chose que l’autre temps, celui fabriqué par les conventions. Enseignants et élèves pratiquent les techniques qui leur permettent d’explorer ce qu’ils sont et qu’ils ignorent. Trop souvent on ne tient pas compte de cette ignorance, car on a trop d’idées sur ce qu’on pense être ! On s’est renseigné, on s’est informé, on a des émotions et de la jugeote. Et surtout, on imagine tellement facilement… qu’on se croit, on est persuadé d’avoir raison, d’être juste. Il suffirait peut-être de relativiser en pensant aux millions de personnes qui ont pratiqué ces techniques avant nous, et souvent bien plus profondément que nous. Je pense à Vlady qui insistait sur le fait qu’il n’avait rien inventé ! 
 
Il nous faut du temps pour apprendre, pour progresser. Encore que le progrès dans l’Art du Chi n’est pas celui qu’on a appris puisqu’il s’agit par exemple de revenir en arrière, avant l’éducation, avant l’élaboration de l’orientation de notre esprit. 
 
Curieux comme l’éducation crée aussi de l’ignorance !
 
Chaque pratique comme chaque technique est une découverte qui n’est rien d’autre qu’une étape parmi d’autres, ni la première ni la dernière. À la fois, bouleversement et émerveillement. Bouleversement, car il y a effondrement d’une certitude et émerveillement, car il y a rapprochement physique avec plus grand que nous. Quelle intelligence, quelle sensibilité, quelle ingénuité d’écoute, quelle humilité, quel souci de liberté dans ces techniques de l’Art du Chi, dans cette pédagogie donc ! Mais attention, chacune de ces qualités peut-être mal interprétée et la liberté se trouve dans les techniques seulement si on est bien guidé. Se taire et écouter, c’est la seule attitude juste pour accepter cette chance immense, rare et donc… violente.
 
Confiance et liberté… Accepter n’est pas se soumettre, et ne rien faire n’est ni ne rien foutre ni se foutre de tout.
 
Cette liberté est à trouver dans la simplicité profonde des techniques qui nous permettent de naviguer un tout petit peu sur l’étendue infinie de la Vie. Suivre la progression des techniques (Chi et Tai Ji Quan) c’est suivre Vlady qui nous guide pour sortir du port et nous mène jusqu’en haute mer (relire L’explorateur du monde intérieur). 
 
Cela prend du temps avant que la pédagogie se dévoile. Heureusement, nous ne sommes pas obligés d’attendre pour enseigner, il suffit de suivre le programme d’enseignement de l’École, même si on est encore loin de l’avoir digéré et intégré. C’est là aussi que « accepter » prend tout son sens, celui de s’ouvrir comme un enfant est capable de le faire. Sans aucun doute, sans le « mais » qui suit généralement le « oui », pour montrer qu’on n’est pas dupe, qu’on ne se laisse pas faire, qu’on est soi-disant libre… Ah, cette personnalité qui construit et encombre notre chemin de vie !
 
Encore…
 
Une certaine maturité découle du nettoyage provenant de la pratique des techniques. Nettoyage physique et mental. Nettoyer notre corps, notre éducation, nettoyer nos certitudes. Pas pour se noyer dans le doute, mais pour rester à l’écoute de cet explorateur du monde intérieur que signalait Vlady. Pour s’apercevoir que notre compréhension des techniques et de leurs effets évolue avec le temps passé en leurs compagnies et réaliser qu’au début, on ne comprend pas grand-chose, car on n’arrête pas d’imaginer comprendre. 
 
Dans un cours ou lors d’une pratique de Tai Ji Quan, qui parle, qui montre ?
 
Lorsqu’on se reconnaît dans les propos ou dans les mouvements de quelqu’un, reconnaît-on celui ou celle qu’on croit être ?
 
Toujours…
 
L’apprentissage ne s’arrêtera jamais. L’Art du Chi est un enseignement sans fin. Nous sommes et resterons élèves à jamais.
 
Un koan classique que Vlady raconta un jour :
L’élève : Maître, quel est le sens de la venue du Bodhidharma en Chine ?
Le maître : Il y a un cyprès dans ma cour.
 
Nous sommes là à la source de l’Art du Chi, Bodhidharma venant de l’Inde et fondant l’école Chan en Chine et qui devint l’école Zen au Japon. 
 
La pédagogie de l’Art du Chi nous rapproche de notre vraie nature qui est celle du vivant. C’est celle de l’arbre, du guépard, de l’amibe, du brin d’herbe et du Bouddha. 
 
 



 



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L’Art du Chi est un art millénaire. Il est diffusé dans plus de 15 pays par les enseignants de l’École de la Voie intérieure, fondée en 1988 par Vlady Stévanovitch, reconnu l’un des maîtres les plus subtils de l’époque moderne en Occident.

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