L'attention - 3e partie


(Troisième partie : L'équilibre en mouvement)

03 MAR 2018


L'attention - 3e partie

Un des premiers jouets que j’ai offert à ma fille était un petit pingouin en plastique bleu et blanc. Il était en forme de poire, sa base était hémisphérique, ce qui fait que lorsqu’on le touchait, il se balançait en émettant des tas de petits « deling-deling », car son corps était rempli de clochettes.
 
Chaque fois que je m’assieds dans le dojo pour réaliser la « prise du Tantien », je pense à ce pingouin. Non pour les clochettes (quoique…) mais pour sa base, car la première chose que nous testons en position assise, c’est la mobilité du bassin. Celui-ci (et toute la posture) doit se comporter comme le pingouin-jouet lorsqu’on le bouscule légèrement. C’est le signe que notre posture n’entrave pas notre liberté de mouvement. Que notre posture est en équilibre, c’est-à-dire qu’il existe une relation toute simple entre la pesanteur qui m’écrase et la force de vie qui me redresse. Pour arriver à cet équilibre, il me faut détendre de nombreux muscles, sans tomber comme dans la demi-roulade, mais plutôt comme je l’ai fait dans mes jambes pendant l’exercice de longue vie. Détendre donc seulement les tensions inutiles, celles des muscles qui ne sont contractés que par habitude. Je continue donc d’apprendre à toujours mieux distinguer les mouvements volontaires de ceux résultant de tics et c’est de plus en plus évident que pour tenir en équilibre, il faut laisser tomber. Il faut lâcher, abandonner beaucoup de choses. Ne retenir que l’essentiel. Nous y reviendrons.
 
Ainsi, et seulement si je suis bien assis, pour faire une bascule arrière (arrondir le bas du dos) je dois faire deux choses : contracter les muscles abdominaux et détendre les muscles du bas du dos. Si l’une de ces deux actions venait à manquer, le bassin ne bougerait pas. Par contre, si les deux actions sont bien synchronisées, le bassin bascule très facilement, et si je relâche alors les muscles abdominaux, mon bassin roule et se remet dans sa position première, en équilibre. Il se comporte comme le pingouin qu’on a bousculé et qui ne cessera de se balancer qu’une fois l’équilibre atteint. C’est le même jeu pour une bascule avant (cambrer), que j’obtiens en contractant les muscles du bas du dos alors que les abdominaux se détendent. Si je supprime l’effort à l’arrière, je fais à nouveau comme le pingouin (avec ou sans clochettes) pendant un petit moment. Voilà pour une observation globale.
 
Le bon sens
Faisons maintenant un peu plus attention. Plus les muscles du bas du dos sont détendus, moins les abdominaux doivent faire d’effort pour réaliser la bascule arrière du bassin. C’est ainsi que je peux chercher l’effort minimal des abdominaux qui fait quand même bouger le bassin. L’effort musculaire va ainsi passer de profond à superficiel. Les premières contractions, plus fortes et plus globales dans le ventre, étaient ressenties en profondeur alors qu’en réduisant progressivement l’effort, elles viennent se loger à fleur de peau.
 
Et c’est là que je laisse une trace maintenant en faisant glisser légèrement le bout de mes doigts, horizontalement, à hauteur du repère avant (à mi-distance entre le nombril et la partie supérieure de l’os pubien). Ensuite, en faisant et refaisant les bascules arrière du bassin dans la plus grande douceur et délicatesse, j’observe l’implication superficielle des muscles abdominaux. C’est mon attention qui sélectionnera et mettra en évidence l’organisation du travail des muscles superficiels uniquement sur la trace que mes doigts on laissé sur la peau du ventre. Même si je sens bien que les muscles travaillent aussi ailleurs, je me concentre seulement sur les délicates contractions qui sont ressenties sur la ligne.
 
Et comme dans l’exercice de longue vie, je trouve progressivement un sens, une orientation au travail de ces muscles superficiels. Ces infimes contractions commencent aux extrémités de la trace qu’avaient laissée mes doigts et glissent vers le centre de cette trace : le repère avant. La trace, de plus en plus sensible, devient comme un sillon qui guide les contractions vers le repère avant au fur et à mesure de la progression de la bascule du bassin. Dès que je détends les muscles, les contractions en se défaisant glissent dans l’autre sens et le bassin revient dans son équilibre premier.
 
C’est curieux qu’une fois observé, cela devient tellement évident qu’on se demande comment il se fait qu’on ne l’ait pas trouvé tout seul. Alors que quelques instants plus tôt, tout était confus, sans aucun sens ou débordant de sens possibles et contradictoires. Nous pouvions évoluer dans toutes les directions… sans aller nulle part.
 
Il a fallu qu’on me le dise, j’ai dû être guidé pour trouver le bon sens. Maintenant, je sais. Mais je ne suis encore nulle part. C’est à moi de travailler, d’éduquer mes muscles, mon attention, ma volonté, de renforcer et d’entretenir ce sens, cette orientation. Cela doit devenir une habitude, un tic. Mais contrairement aux routines habituelles, celle-ci, je l’ai voulue, je l’ai consciemment choisie. C’est le bon sens, celui qui me guidera jusqu’au cœur, au centre de moi-même.
 
À SUIVRE…
(Cet article fut écrit alors que je donnais un stage sur le Tantien, en février 2017)



 



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